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VIRUS-32 - BIFFF2022 ©DR.

VIRUS-32. Les Variations Zombiques.

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Un virus – une mutation – un caprice de Dieu, bref, shazam, les morts reviennent à la vie sous forme d’hères affamés de chair humaine. Les (futures) victimes courent dans tous les sens, comprennent au bout d’une ou deux rencontres fatales qu’il s’agit de viser la tête, et le film déroule un écheveau assez convenu: balades dans les sous-bois ou dans les caves ou dans les décombres industriels de la société décimée, rencontres terrifiantes avec supplément gore, fin de parcours en fausse happy end, parce que «c’est le destin». Bref, on sait presque tout. Avant de voir le film.

Le film de Zombies, c’est comme les variations de Bach et de Glenn Gould.

Et si justement c’était là que résidait le plaisir? Prenez Virus-32, de Gustavo Hernández. Le cinéaste ne tombe pas de la dernière apocalypse. La Casa Nuda, son opus précédent, avait été remarqué à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes. Filmé en un seul plan-séquence de 78 minutes avec un appareil photo numérique, le film est effrayant parce que le spectateur connaît les codes du genre dans lequel il s’inscrit. Savoir permet d’anticiper, et d’apprécier les nuances d’interprétation de l’auteur. Le film de Zombies, c’est comme les variations de Bach et de Glenn Gould. Le plaisir de retrouver la trame, la jouissance des écarts.

VIRUS-32 – BIFFF2022 ©DR.

Même topo pour Virus-32. Quand Iris, veilleuse de nuit dans un centre sportif décati de Montevideo (en Uruguay, d’où vient le réalisateur), décide d’y emmener sa petite fille, et que les premières silhouettes sombres laissent des traces de sang sur les parois vitrées, les spectateurs du Bifff se carrent dans leurs fauteuils. Ça va déguster sévère. Chic. On est là pour ça.

Les décérébrés galopent à fond de train dans le centre sportif…

Et le plaisir naît des petites inventions autour d’une trame connue. D’abord, ces zombies-ci courent. Très vite. Pas Walking, les Dead. On le sait depuis Dan O’Bannon et son Return of the Living Dead (1985), ça met du rythme, et les courses poursuites de Virus-32 sont épiques. Les décérébrés galopent à fond de train dans le centre sportif, à la chasse aux deux ou trois humains qui comptent leurs abattis, essoufflés. Et puis 32… Quand un des zombies de Gustavo vient de se déchaîner – sur un rat, un chat, un humain, tout ce qui respire – il y a une stase, une sorte de moment de suspension, de plénitude, où il reste immobile, comme en méditation sur son destin de mort animé, à la recherche du souffle d’âme perdu.

Ces 32 secondes laissent un «interstice» de scénario, une faille qui permet de jouer au chat et à la souris, et qui donne une chance à la souris (Iris en l’occurrence), de se faire la malle. Mais, troisième variation, les Zombies uruguayens ne perdent pas tout à fait le sens de la réflexion: un coup d’œil aux caméras de surveillance, et hop, on repère les proies qui espéraient prendre la poudre d’escampette.

Alors, vont-elles survivre? Les zombies flottent-ils et apprennent-ils à nager? La psychanalyse de la petite fille sera-t-elle longue (un sacré paquet de traumatismes à digérer)?

Gustavo joue de son clavier bien tempéré de toutes les ficelles d’un scénario convenu, et filme nerveusement cette jubilatoire apocalypse.

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