RECHERCHER SUR LA POINTE :

Je m'amuse à glaner des œuvres à Bruxelles ou ailleurs. Je prends plaisir à alimenter ma bibliothèque intime, méli-mélo anarchique de films et d'arts vivants.  Le bric-à-brac c'est: Assumer pleinement un regard situé ̶ queer, féministe et décolonial ̶ comprendre ce qui me touche, me marque, me questionne et restituer mes notes comme autant de pensées attrapées au vol.
épisode 3/3
3/3
Extimité.s ©Barbara Buchmann-Cotterot

Extimité.s par Zéphyr

Émois

épisode 3/3

Garden Party, Théâtre des Doms, 19h30

«Cheveux courts. Drôle de tête»
«Démarche assurée»
…ou pas?
«C’est un mec»
« –…ou pas?»
«Y a d’la poitrine, c’est une meuf c’est sûr!»
                                                     – ou pas…
«Quand même. C’est bizarre tout ça»
«C’est une gouine alors? Ou un punk, j’sais pas.»
«Trop bizarre…»
«Bonjour Monsieur! Euh, Madame, pardon!
Ou Mademoiselle peut-être? (Clin d’oeil, clin d’oeil)»

©Barbara Buchmann-Cotterot

Extimité.s est un spectacle qui dit l’intime. Au départ, un texte de slam qui retrace en partie, une vie d’avant. La poésie trouve les mots justes. Ceux-ci nous parlent de transidentité, de sortir de l’hétérosexualité et d’un amour puissant à réinventer sans cesse, entre un parent et son enfant.

Si c’était ni trop pompeux ni tiré par les cheveux, je dirais qu’Extimité.s, c’est Sisyphe qui se rebelle. Mais c’est un peu lourd de ramener de la mythologie grecque dans le quotidien d’un foyer bien tenu juste parce que le narrateur de cette histoire s’appelle Zéphyr.

Je note – c’est beau Zéphyr!

La création sonore d’Isa Stragliati scande comme le son des cloches -dring- ou le bruit régulier du couteau de cuisine qui émince les légumes du soir-tac. On se croirait presque dans une adaptation de Jeanne Dielman. À ceci près que le temps ici, ne nous pèse pas. Zéphyr nous dit l’ennui, la routine, la ritournelle avec une plume extrêmement belle, fragile et légère.

©Barbara Buchmann-Cotterot

Extimité.s parle d’abord d’un vécu, d’une expérience individuelle qui n’aurait a priori rien de politique, rien de collectif. Et pourtant, c’est une histoire déclinée en Je qui résonne avec d’autres: les jours sans surprises, les cachets et l’ennui, la violence du patriarcat. Puis le sursaut inattendu: partir et se redécouvrir.

C’est quoi être parent quand on ne l’a pas choisi? C’est quoi être parent après un coming-out trans? Comment on aime son enfant, sans s’oublier?

Partir et se trouver, c’est un peu l’arc narratif de beaucoup d’histoires qu’on connait; ici, il est appliqué à un parcours queer. Une transition parallèle à une parentalité à réinventer. Se tailler, quitter les robes et la popote, tomber amoureux, découvrir le désir, se tailler une coupe sur mesure et des shorts assortis. Aimer. Aimer, aimer, aimer.

Il n’est jamais trop tard pour devenir soi: une autre lapalissade, pardon, mais ça fait toujours du bien de la relire, celle-là.

©Barbara Buchmann-Cotterot

Eximité.s -en plus d’être un très beau mot- qui rime avec timidité- est un récit qui cisaille comme les heures, comme l’aiguille d’une horloge. C’est aussi un récit d’amour, d’un amour très grand, d’un parent pour son enfant. Un cri du fond des tripes. Le texte vibrant qui nous est partagé porte la vulnérabilité d’avouer que la parentalité, ça ne s’apprend pas d’avance. On apprend sur le tas et on fait du mieux qu’on peut.

Une parentalité non désirée qu’on apprivoise peu à peu.

C’est touchant car dans une société qui s’évertue à lever les tabous, celui-ci en est un grand: celle d’une parentalité non désirée et qu’on apprivoise peu à peu. La pièce questionne l’injonction au sacrifice maternel, à l’abnégation des madones et réconcilie l’amour de soi et de l’être mis au monde.

J’étais pas prêt du tout

À mettre une âme sur Terre

Et puis y a ce jour où tu m’as regardé, Tes yeux

dans les miens, bien ancrés.

«Tu sais Mayou, moi, je t’ai choisi.»

___

Extimité.s est programmé le 29 septembre 2024 au Centre Culturel Bruegel à 19:30.


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