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Cécile de France dans le film Dalloway (2025) ©ZHOU YUCHAO/Mandarin & Compagnie – Gaumont.

Dalloway ouvre le Nifff!

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Oui, vous avez bien lu, le Nifff, avec N comme Neuchâtel en Suisse. Le Neuchâtel International Fantastic Film Festival, une institution ici, qui génère à travers la ville une série de manifestations, d’expositions, de projections en plein air, et draine un public joyeux, averti, helvète et très enthousiaste. Douze jours de fête, près de 130 films au programme, une série de salles disséminées dans la ville et une poignée de thèmes qui dessinent les «arcs narratifs» du Festival: Take Care (à prendre avec un zeste d’ironie), Imaging the future, un zoom sur les cinémas asiatiques, un forum littéraire et des expositions digitales, technos et belles. La magie d’un vrai Festival au bord du lac.

Et donc, Dalloway: une fable légèrement dystopique – mais si peu – qui met en scène Clarissa (Cécile de France), autrice de livres pour ados, qui peine sur son nouveau roman pour adultes dans une résidence d’artistes du proche futur.

Le presque huis-clos qui met aux prises Clarissa et Dalloway est la partie la plus réussie du thriller.

Un roman consacré à Virginia Woolf, avec qui le film joue en références et hommages. Pour l’assister au quotidien dans «sa chambre à soi», il y a Dalloway, une intelligence artificielle très très attentionnée, à qui Clarissa se confie, à la recherche de la voix intérieure qui lui permettra finalement de rendre compte du suicide de son fils…

Oui, mais, l’AI n’est pas notre bon vieux ChatGPT, qui bafouille encore quelques copies d’étudiants un rien trop lisses et standardisées, mais la Super AI d’une génération enchantée, qui a en toute logique la voix de Mylène Farmer et apprend les sentiments, scrute les doutes de Clarissa, dissèque ses silences. Que se passe-t-il quand l’AI devient notre thérapeute et l’accoucheuse de nos âmes tourmentées?

Le film prend le temps d’installer un décor de Paris-Bruxelles sous canicule et épidémie façon Covid, une résidence d’artistes un peu trop parfaite, dont la troublante animatrice est interprétée par Anne Mouglalis, qui a fait du chemin depuis Merci pour le chocolat de Chabrol. Mads Mikkelsen complète le trio humain en «whistleblower» inquiet et désabusé.

Le presque huis-clos qui met aux prises Clarissa et Dalloway est la partie la plus réussie du thriller de Yann Gozlan (qui nous avait offert La Boîte Noire avec Pierre Niney en 2021). Le film suit un rythme respiratoire, comme le livre de Virginia Woolf – Mrs Dalloway – qui lui aussi se centrait sur les réflexions d’une femme face au suicide d’un jeune homme.

Une lenteur assumée. La caméra regarde Clarissa. L’AI et nous scrutons le visage de la romancière. Une intensité souvent entomologique. Un visage qui occupe tout l’écran. On évoque Renée Falconetti, la Jeanne d’Arc de Dreyer. L’émotion vient de l’avidité et de l’empathie maladive de l’AI qui cherche à percer l’écran des yeux de l’actrice. C’est le film en sourdine qui se joue dans Dalloway, et celui qui est le plus intéressant. On cherche avec l’AI manipulatrice et intrusive cette lueur indicible qui lui permettra peut-être à son tour de ressentir une souffrance ontologiquement humaine.

Dalloway, coproduction franco-belge de Yann Gozlan sortira en Belgique à la rentrée.


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