RECHERCHER SUR LA POINTE :

Cette série nous plonge dans des séquences de films et explore comment des plans spécifiques provoquent des émotions et réflexions essentielles.
épisode 2/2
2/2
©STÉPHANIE BRANCHU/PYRAMIDE FILMS

La fille de son père

Émois

épisode 2/2

Où est l’amour? Se trouve t-il dans des mots, un objet ou des gestes? Suffit-il d’un sourire ou d’un regard pour l’évoquer? Et comment revenir à la vie quand l’objet de notre amour disparaît?

Erwan Le Duc brasse ces diverses questions dans son deuxième long-métrage, La fille de son père.
Il y a pourtant ce nouvel amour, Hélène, avec qui Etienne s’apprête à franchir une nouvelle étape dans un appartement où ils pourront s’aimer, grandir et vieillir. Elle lui rappelle d’ailleurs dans un échange sensible cette promesse qu’il lui a adressée: celle d’être là, avec elle, pas ailleurs.

©STÉPHANIE BRANCHU/PYRAMIDE FILMS

Mais la présence physique ne peut pas toujours compenser une absence émotionnelle, un effacement vers la nostalgie et la question du «Et si… ?», perpétuelle interrogation qui peut noyer tout un chacun effleurant les eaux de la mélancolie et de l’incertitude. C’est donc elle qui va réinvoquer cet amour dans une image, l’avant-dernière du film, par le biais d’un simple morceau de piano.

Le mouvement de la caméra est porteur d’un espoir…

Le plan en question démarre sur Hélène, seule dans cet appartement meublé uniquement de l’instrument. Tandis qu’elle joue, la caméra traverse le vide de cet appartement, passant dans les pièces pour aboutir à l’extérieur et assister, en plongée, au retour d’Etienne, parti sur les traces de son ancien amour impossible, ce fantôme du passé qu’il ne parvient pas à oublier. Mais il revient, dans le présent de ce nouvel amour, auprès cette femme qui n’a jamais été absente.

Le mouvement de la caméra est porteur d’un espoir, celui de retrouvailles émues, comme d’un retour parmi les vivants. Même le morceau joué par Hélène, «You’ll never walk alone», est également évocateur de cette fin de solitude, aussi bien pour Etienne, hanté par les impossibilités du passé, que pour Hélène, située dans l’ombre de cet amour disparu.

Où est donc l’amour? Dans tant de choses impossibles à lister. Mais il peut démarrer de cette chose si simple et essentielle que notre besoin de nous connecter à l’autre. Hélène joue donc ce morceau emblématique, un chant connu des supporters de Liverpool, pour invoquer l’être qu’elle aime (Etienne est entraîneur de foot de profession). Cela peut paraître un détail anodin, mais n’est-ce pas dans ces petites choses que l’on peut trouver le plus fort des sentiments?

Dans le romantisme d’une caméra en mouvement, on peut ressentir toute l’énergie et la poésie de ce sentiment puissant. Etienne est réincarné par le pouvoir d’une image et d’une musique. Dans un court geste de cinéma, dans une image quasi prête à clôturer son film, Erwan Le Duc rappelle que l’amour est là, omniprésent. Il suffit juste de l’appeler et d’attendre sa réponse.


La Fille de son père de Erwan Le Duc, avec Céleste Brunnquell et Nahuel Pérez Biscayart), Domino Films, 2023.

Programmé en ce moment au cinéma Les Grignoux à Liège et au Vendôme à Bruxelles.


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