RECHERCHER SUR LA POINTE :

Une radioscopie de navets cinéphiles à la recherche de leurs pépites.
épisode 4/6
4/6
The Flash ©DR

L’émotion dans un regard

Émois

épisode 4/6

Le genre «super-héros» surabonde ces derniers temps, parfois au détriment de la qualité. Le public commence à bouder ces films autrefois couronnés de popularité. En 2023, sur 8 titres (Spider-Man: Across the Spider-Verse, Les Gardiens de la Galaxie 3, Shazam 2: la furie des dieux, Blue Beetle, Ant-Man et la Guêpe: Quantumania, The Marvels, Aquaman et le royaume perdu, The Flash), les six derniers sont loin d’avoir eu le succès escompté. Les résultats critiques mais surtout financiers illustrent la dissonance entre les attentes des spectateurs et les productions super-héroïques. C’est particulièrement vrai pour The Flash.

S’attaquer à The Flash est comparable à tirer sur une ambulance qui brûle déjà depuis des mois, laissant derrière elle une odeur de ratage industriel (les 270 millions de dollars de recettes à travers le monde ne permettant pas de compenser le budget de production et de marketing du film). Le film d’Andy Muschietti se révèle symptomatique de tous les reproches que l’on peut adresser envers les films de super-héros, tant il cumule les problèmes.

Un long-métrage offrant régulièrement une sensation de vide physique…

La production, marquée par les changements de réalisateurs et un cahier des charges imposants, a constamment transformé le scénario jusque dans ses racines, tiraillant l’intrigue entre gags cartoonesques et instants de gravité, sans réel liant. Les effets numériques criards ont également fait les choux gras des médias, et ce malgré les déclarations du réalisateur selon lequel il s’agirait d’un choix délibéré.

De plus, le besoin de faire des références à d’autres films comme Man of steel, les Batman de Tim Burton ou même Batman et Robin dans une pirouette finale, enlève toute identité à un long-métrage offrant régulièrement une sensation de vide physique: les rues et les décors semblent, en effet, déserts. C’est là que se niche la contradiction la plus frappante du film: une volonté de créer une épaisseur émotionnelle dans une mécanique narrative malheureusement trop rouillée.

De prime abord, l’intrigue est simple: notre héros, Barry Allen, veut éviter à sa mère de se faire assassiner et à son père d’être injustement emprisonné pour ce meurtre. Ce qui devait être le centre du film se retrouve malheureusement abandonné pour laisser place à des sous-intrigues alambiquées. C’est d’autant plus dommageable car c’est là, perdu dans des fils artificiels, que bat le cœur émotionnel du film, dans la simplicité d’un regard, en l’occurrence ici celui de l’actrice Maribel Verdú.

The Flash ©DR

Dans le rôle secondaire de la mère de Barry, celle que nous avons pu voir dans de biens meilleurs films comme Le Labyrinthe de Pan parvient à intégrer ce qui manquait désespérément à ce long-métrage: une dimension humaine. The Flash réussit dans de trop rares fulgurances à véhiculer une réflexion sur la perte et le deuil. Nous sommes face à un personnage qui espère sauver sa mère et Maribel Verdú, qui incarne celle-ci, développe, dans ses quelques instants de présence, un lien tangible avec ce fils éploré. On retrouve dans ses gestes une sincérité bien éloignée des mécaniques du film, une grâce qui entre en contradiction avec le ton par ailleurs souvent peu incarné de l’interprétation. L’humain ressort de ces séquences, et l’intime désir de retrouver les êtres qui nous sont chers.

Dans les films de ce genre, en général, le super-héros, censé sauver la population, ne peut malheureusement se sauver lui-même car il est victime d’une déshumanisation. C’est pourtant quand l’humain émerge du costume que les plus grands titres du genre ont su se démarquer: Spider-Man 2, par exemple, voit son héros accumuler les problèmes du quotidien (payer son loyer, être un bon neveu, déclarer son amour à la femme qu’il aime…); le Superman de Richard Donner joue beaucoup sur la relation amoureuse entre Loïs Lane et Clark Kent/Superman, faisant au passage des clins d’œil aux comédies des années 1930/40…

Malheureusement pour The Flash, c’est seulement dans l’émotion fugace du regard de Maribel Verdú que le film se dévoile comme celui qu’il aurait dû être.

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The Flash, Andy Muschietti, 2023


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